Les pièges classiques
Nous allons vous parler ici de quelques pièges et de certaines observations utiles pour placer des attaques un minimum construites à l’encontre de vos adversaires. Nous ne parlerons pas ici des erreurs d’inattention, grosses boulettes ou erreurs d’étourderies qui sont bien sûr des choses à bannir, mais de techniques simples qui vous permettront tout de même de prendre l’avantage à coup sûr.
Sommaire
Les pièges classiques, au début, sont surtout liés à la découverte et à la fragilité du roi, à l’exploitation des faiblesses ou forces de certaines pièces, à la surexploitation ou à l’élimination du défenseur. Certaines idées sont un peu moins évidentes à déceler ou anticiper, et sont pourtant très fréquentes.
Ces thèmes récurrents sont des cas particuliers qui servent de base à des combinaisons tactiques et stratégiques dont il faut se méfier, et qu’on doit savoir pour poser des problèmes à son adversaire.
La surcharge
Parfois, une pièce ne peut pas faire deux choses à la fois : si comme ici, une figure défend deux pièces à la fois, ou si elle protégeait deux cases « vitales » bien distinctes, elle pourra remplir son rôle une première fois, mais le plus souvent, pas deux. Imaginons qu’un cavalier protège deux pièces, comme ici, le cavalier ç6 protège le fou et le cavalier en b4. Lors de la première capture, il joue bien le rôle espéré en b4, mais il ne pourra pas se démultiplier une seconde fois, et la deuxième pièce protégée en e5 initialement devient prenable (ici, le fou).
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La surcharge | Animation |
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La surcharge | Animation |
Une pièce sur-utilisée peut donc s’avérer être une cible, comme on vient de le voir, et faire l’objet d’une « déviation ». Une fois que le cavalier a repris le fou, le fou noir est attaqué 2 fois et va être perdu.
L’élimination du défenseur
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L’élimination du défenseur | Animation |
C’est un peu le même principe que la surcharge, mais au lieu de surcharger le défenseur, il s’agit carrément de l’éliminer. Il ne pourra donc plus être là pour jouer son rôle, quel qu’il soit, qui pouvait être important.
Une fois pris, on pourra constater que la pièce sur qui il veillait va se faire cueillir malheureusement, comme c’est le cas ici pour le pion e5. Ceci est aussi valable pour un autre rôle que la défense exclusive d’une pièce : le contrôle d’une case, d’une colonne, ou d’une diagonale.
L’ordre inversé des pièce qui défendent
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Ordre de défense inversé | Animation |
On comprend aisément l’idée de l’importance de contrôler une case autant de fois que l’adversaire, afin d’être le dernier à reprendre et ainsi d’avoir le dernier mot, dans une série d’échanges.
Il faut être conscient que cela est valable seulement si les pièces échangées ont la même valeur (ou inférieure), et que l’ordre de la capture permet que les pièces supérieures n’aient pas à s’éliminer face à des pièces mineures.
La case peut aussi être contrôlée autant de fois, mais les pièces être disposées dans le mauvais ordre.
Ainsi, si on engage des pièces plus importantes au global, même temporairement, on va perdre du matériel, forcément. Car l’adversaire peut interrompre le combat à tout moment, à son avantage, si on engage une pièce trop importante trop tôt.
La case insuffisamment contrôlée
La case « pas vraiment interdite »
Le fait de contrôler une case une fois, avec un pion notamment, ne suffit pas toujours à en interdire l’accès, et il faut à tout prix se méfier des illusions.
Ainsi, ici, les cavaliers ont intérêt à se porter en g3, afin d’infliger une « fourchette royale », malgré la présence d’un pion en h2. Le premier cavalier est sacrifié et sera certainement capturé par le pion, mais le second subsistera, et attaquera simultanément le roi et la reine de l’adversaire, qu’il capturera au tour suivant. Une dame et un pion valant beaucoup plus que les deux cavaliers engagés, le sacrifice aura été payant.
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Case pas vraiment interdite | Animation |
Une case de fourchette royale défendue par un pion, mais accessible à deux cavaliers. Le premier cavalier y va, sacrifié, suivi par le deuxième, qui fait mouche.
Le coup « pas vraiment interdit »
Ici, le cavalier f3 semble ne pas pouvoir prendre en e5, pour deux raisons : la première, il est cloué par le fou, et en se déplaçant, il permet aux noirs de prendre la dame (!). Et deuxièmement, même sans le fou, le pion e5 serait protégé par le pion d6.
Exemple : le Mat de Legal
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Position du Mat de legal | Animation |
Le mat de Legal, avec le clouage relatif (déplacement habituellement très déconseillé, mais permis par le règlement).
Avec le fou noir en g4, le cavalier en f3, et la Dame en D1, on pense que le cavalier ne jouera pas sous peine de laisser la dame en prise, mais on se permet pourtant de la sacrifier, car si l’adversaire se jetait sur la reine, il perdrait le roi.
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Le Mat de Legal joué à partir du début |
La faiblesse de la case f7
Le coup du berger
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Le coup du berger |
Cette case est souvent essentielle. C’est à la fois la case la plus faible au début, puisque seul le roi la protège, et c’est pour cette même raison une des plus dangereuse, puisqu’elle peut être l’emplacement de l’arrivée préparée de la dame adverse, qui aboutirait ainsi à un échec et mat. Le thème et l’idée du mat du berger sont basés sur cette simple observation.
La fourchette en f7 et en ç7
Ces deux cases peuvent parfois être la cible d’un cavalier, soutenu par un fou, par exemple. Son arrivée peut être très dangereuse si elle est non désirée, surtout si les pièces lourdes (les tours, la dame ou le roi) sont encore à leur place initiale.
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La fourchette en ç7 |
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La fourchette en f7 |
Le coup qu’on croyait forcé à tort
On pense que la réponse adverse est parfois évidente, mais il faut vérifier aussi les réponses surprenantes, car l’évidence est parfois l’ennemie du joueur d’échecs.
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Le mat de Legal évité | Animation |
Exemple : Encore une position sur le thème du mat de Legal, mais cette fois, mal réalisé : on sacrifie la reine, mais l’adversaire la refuse. Il n’est pas forcé de prendre la reine, il peut ici prendre le cavalier en e5 avec son cavalier ç6, et défendre du même coup son fou g5. Ce sacrifice refusé se retourne contre nous.
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La partie depuis le début |
La fourchette de pion
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Animation |
Une fourchette de pion se voit logiquement venir, mais est toujours désagréable. Il faut alors choisir quelle pièce abandonner, si jamais.
La tour coincée dans le coin
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Animation |
La tour est une pièce puissante, mais qui peut aussi manquer de mobilité. Un fou peut régulièrement la contrarier et la viser, si la grande diagonale est ouverte. Si le cavalier n’a pas bougé et que la tour est coincée, le risque de la voir disparaître existe.
Conclusion : penser à ce thème : toujours pouvoir placer un pion, un cavalier ou un fou en barrage au fou adverse sur la grande diagonale, si la tour peut être visée et ne peut pas se déplacer.
L’ouverture de la colonne tour
Voici un exemple du risque :
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Animation |
Sur les colonnes situées sur bord de l’échiquier, les colonnes occupées par les tours initialement, c’est à dire les colonnes notées «A» et «H», en notation usuelle :
Si la colonne s’ouvre après un échange de pions, et que les tours sont en vis-à-vis à cet instant, la première tour ayant le champ libre peut « ouvrir le feu » sur sa rivale, sans que celle-ci ne puisse naturellement résister, ni riposter, ayant disparue de manière si soudaine, et définitive.
Ce genre de menace est d’autant plus dangereuse, que faire avec une tour en moins est déjà presque impossible dans une partie normale, dans la plupart des cas, et qu’en plus, une tour parvenue sur la dernière rangée, sans rien pour la contrer, a souvent l’occasion d’aggraver les dégâts de manière encore plus irréparable, par la suite.
Bien sûr, on doit se rendre compte de ce genre de choses, lorsqu’elles sont sur le point d’arriver, ce n’est pas très compliqué.
Et même, avant de constater qu’un pion est ainsi « cloué », et ne peut reprendre, il est normal de prévoir ce cas de figure.
Et avant de prendre quoi que ce soit, avec un pion, on doit toujours vérifier que rien de grave ne se produit suite au déplacement de ce pion, ni par l’ouverture d’une colonne, ni par l’ouverture d’une diagonale.
Ceci est valable dans le cas du pion « tour », mais c’est aussi valable dans d’autres cas, que vous rencontrerez certainement.
Application dans l’ouverture : le Gambit dame accepté
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Animation |
1. d4 d5 2. ç4 dxç4 3. e3 b5 (tentant de protéger le pion en plus) 4. a4 a6 (croyant protéger le pion b5) axb5 ! gagne au moins le pion. Et si axb5 ?? alors évidemment, Txa8, gain de la tour, et probablement de la partie.
Sur la colonne Tour (les colonnes « a » et « h »), si la colonne s’ouvre avec l’échange de pions, du fait du vis-à-vis, la première tour ayant le champ libre peut « ouvrir le feu » sur sa rivale, sans qu’elle puisse naturellement résister.
La diagonale mortelle du roi
La diagonale e8-h5 peut vite se retrouver très dangereuse, très faible. Trop dangereuse, trop faible. C’est un danger qui peut s’avérer complètement mortel.
Exemple 1 : La défense damiano
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La défense Damiano | Animation |
C’est une ouverture où on se permet de sacrifier un cavalier dès le troisième coup, pour obtenir la diagonale en question.
1. e4, e5,
2.Cf3, f6 ?
On peut ici « sacrifier » le cavalier, pour affaiblir la case e5. Sur fxe5, Dh5 se révèle problématique (voir dans la partie pièges d’ouverture).
La diagonale e8-h5 peut vite se retrouver très, trop faible.
Exemple 2 : Le Mat de l’idiot !
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Le mat de l’idiot ! | Animation |
Le mat de l’idiot, qui conclut la partie en 2 coups, devrait vous faire réfléchir aux conséquences de l’abandon de cette diagonale.
1.f4, e6
2. g4 ?? grave erreur ! Dh4 !! échec et mat.
La reine : spécialiste de l’attaque double
Echec en diagonale, puis prise horizontale. Ou bien échec horizontal, puis prise en diagonale.
En donnant échec au roi en a4 (ou en h5). (ou en a5 et h4, pour les noirs).
On pense pouvoir se lancer à l’offensive en postant un cavalier ou un fou sur la 5è rangée, pour attaquer.
Mais c’est oublier la venue de la reine en a4, ou h5, faisant échec, et capturant la pièce qui n’était pas protégée, à l’horizontale.
L’échec à la découverte
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Exemple : la défense Petroff | Animation |
Dans cette position : e4, e5, Cf3, Cf6, Cxe5, sur Cxe4 ?, on joue alors De2. Si le cavalier s’en va, c’est le drame pour les noirs, car le cavalier e5 bouge en ç6, provoquant à la fois la mise en échec du roi (en libérant la dame), et l’attaque de la dame noire. Il mangera la dame au coup suivant, soit en d8, soit en e7, si elle s’interpose elle-même pour couvrir l’échec.
Pour cette raison il ne fallait pas reprendre le pion e4 tout de suite, mais jouer d3 pour chasser le cavalier blanc, puis alors reprendre le pion. Sur De2, on joue alors De7, défendant simplement le cavalier et lui permettant le repli au coup suivant, la dame « déclouant » le cavalier.
L’avancée trop téméraire du pion
Un pion ne revenant pas en arrière, si on l’avance trop et qu’on ne peut pas le soutenir ou l’échanger, il peut être considéré comme perdu.
Le sacrifice de pièce
Ceci est une spécialité, chez certains. S’il est volontaire (espérons le), il fera parfois sauter un verrou, et provoquera des ravages grâce à l’élimination de la défense.
L’abandon de la première rangée (le mat du couloir)
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Le mat du couloir | Animation |
Si on a roqué et que la première ligne est désertée, une tour peut débarquer et mettre fin à la partie, si le roi est coincé. C’est le mat du couloir. Si on déserte la première ligne, toujours interdire l’arrivée d’une tour, ou donner une case de fuite au roi (en poussant g3 ou h3 selon la position).
La reine face au petit roque
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Gagner la qualité | Animation |
Cette configuration est menaçante vis-à-vis du petit roque : Si la dame est en g3 et le pion g7 est défendu uniquement par le roi en g8, si notre fou parvient en h6, on menace mat. Si la seule défense est d’avancer le pion g7 en g6, et si la tour f8 est toujours à sa place depuis le roque, on gagne une qualité par Fxf8 !