Le jeu d’échecs dans la littérature
Beaucoup d’écrivains ont utilisé, ou utilisent ponctuellement ou comme élément important de la trame de leur récit, le jeu d’échecs. Parmi eux, deux se sont particulièrement distingués, en plaçant continuellement le jeu au centre de l’intrigue : « Le Joueur d’échecs », de Stefan Zweig, et « La Défense Loujine », de Vladimir Nabokov.
« Le Joueur d’échecs », nouvelle fameuse de Stefan Zweig, a pour sujet l’affrontement d’un joueur particulièrement doué qui a appris seul à jouer aux échecs, seule façon pour lui de garder son esprit alerte alors qu’il était emprisonné en isolement total sous le régime nazi, et du champion du monde fictif de l’époque, un homme particulièrement vulgaire et inculte. Le personnage principal finit par abandonner le match, pour ne pas sombrer totalement dans la folie.
« La Défense Loujine » raconte la vie de Loujine, un joueur d’échecs russe fictif qui arrive au plus haut niveau, et que l’excès de jeu d’échecs conduit, lui aussi, à la folie. Le roman est particulièrement acclamé par la critique pour la façon dont il dépeint l’univers intérieur du joueur d’échecs, et ce qui se passe dans son esprit lorsqu’il réfléchit.
Certains romans utilisent les échecs comme élément de la trame de fond. Ainsi, l’intrigue du « Tableau du maître flamand », d’Arturo Pérez-Reverte, s’explique par une « analyse rétrograde », et celle de « La ville est un échiquier », par la liste des coups d’une partie : la partie « Steinitz – Tchigorine ». Dans L’Échiquier du mal de Dan Simmons, les personnages capables de « dominer » d’autres personnages les utilisent pour jouer une partie d’échecs vivante. La nouvelle « Un combat », de Patrick Süskind, relate une partie où le gagnant n’est pas celui qu’on pense, illustrant l’importance de la psychologie dans le jeu. Dans « La Joueuse d’échecs » (adapté au cinéma) de Bertina Henrichs, une modeste femme de ménage grecque découvre la puissance du jeu d’échecs.
D’autres livres entrent également dans cette catégorie, comme « 5150 rue des Ormes », de Patrick Senécal, « La ville est un échiquier » de John Brunner, « Le Huit », de Katherine Neville, « Le Gambit des étoiles » de Gérard Klein, et « Fous d’échecs », de Serge Rezvani.
En bande dessinée, le manga français « Zeitnot », de Ed Tourriol et Eckyo, se déroule dans le milieu des clubs d’échecs lycéens.
Le jeu d’échecs est également mentionné pour son pouvoir évocateur dans de nombreux livres, comme « De l’autre côté du miroir », où Alice participe à une partie « grandeur nature », « Le Neveu de Rameau » de Denis Diderot, où, dans l’incipit, Diderot fait référence au Café de la Régence et à ses joueurs d’échecs de l’époque, notamment Légal (connu pour son mat) et Philidor (connu pour la défense du même nom). Isaac Asimov a mis en scène les échecs dans plusieurs de ses romans et nouvelles, notamment « Cailloux dans le ciel », où ce jeu est présenté comme une des rares choses qui n’ont pas changé au cours des millénaires. Balzac, dans « Le Bal de Sceaux », décrit l’habileté aux échecs comme une qualité louable chez un gentilhomme.
On peut également citer « Fin de Partie » (« Endgame »), pièce de théâtre écrite par Samuel Beckett, amateur d’échecs. Le titre de cette pièce renvoie au jeu d’échecs et de nombreuses références subtiles y sont faites par le biais des actes, des rôles et des positions des personnages : déplacements de Clov lors de la scène d’ouverture; position centrale de Hamm (personnage tyrannique dont le fauteuil roulant apparait vite comme un trône), évoquant là-encore la position du roi d’échecs.
Dans la nouvelle « Strange Eden » (« Étrange Eden ») de Philip K. Dick, la jeune femme extraterrestre que rencontre Brent lui propose une partie d’échecs; puis elle lui apprend que c’est son peuple qui l’aurait introduit chez les brahmanes.
Dans le recueil de nouvelles « Fantômes et farfafouilles », de Fredric Brown, La nouvelle « L’hérésie du fou » est en fait une partie d’échecs vue par un fou d’échecs (« Bishop », en anglais). Tout le long de la narration, en point de vue interne, une atmosphère de guerre moyenâgeuse s’impose à l’esprit du lecteur.
Dans la nouvelle « Un châtiment sur mesure », d’Isaac Asimov, le personnage principal Ian Bradstone est un joueur d’échecs talentueux.
Dans le Roman « L’ultime secret » de Bernard Werber, Isidore et Lucrèce enquêtent sur l’étrange mort de Samuel Fincher, génie fictif du jeu d’échecs ayant vaincu le meilleur ordinateur à ce jour.